Colloque "Moyens de Paiement"
Le Colloque « Moyens de paiement, le temps des ruptures » organisé par l’ADEN, EESTEL en partenariat avec la DGCIS s’est déroulé à Bercy le 30 Janvier 2012. Dans un précédent billet, j’avais eu l’occasion de résumer ma propre intervention, un Tour du monde des nouveaux moyens de paiement. Cet article en deux parties va tenter de résumer les faits marquants de la journée dédiée à « analyser les bouleversements du paysage des paiements, décrypter les nouvelles technologies et les nouveaux acteurs du marché, comprendre et intégrer le point de vue des utilisateurs. Le paysage des moyens de paiement connaît aujourd’hui une véritable évolution, voire révolution. Plusieurs facteurs sont à l’origine des profonds bouleversements actuellement en marche : le projet d’Europe des paiements, la multiplication des usages via Internet et le mobile, l’arrivée de nouveaux types d’acteurs, ou encore l’évolution de la règlementation… »
Bernard Benhamou, Ministère de l'Industrie
Quatre tables rondes animées par Régis Bouyala et quelques keynotes ont rythmé la journée. Après l’ouverture du colloque par Olivier Midière, Président de l‘ADEN, c’est Bernard Benhamou, Délégué aux usages de l’Internet auprès du Ministère de l’Industrie qui a lancé les débats rappelant les mutations apportées par les nouvelles technologies, parlant de destruction créatrice, des acteurs aussi bien dans le Nord que dans le Sud (Mpesa), abordant les sujets de la confiance (le mpaiement n’accepte pas les erreurs) au coeur des enjeux, de l’expérience utilisateur (intime) et de la chance pour l’industrie française (écosystème des paiements, cerveaux). Réfléchir transversalement. Aucun secteur d’activité qui ne soit pas impacté par la numérisation. L’Europe est trop focalisé sur les infrastructures et pas assez sur les services.
Thème de la matinée « Quel avenir pour l’industrie des paiements ? »
Jean Lassignardie, Cap Gemini
Jean Lassignardie, Cap Gemini a abordé le « Panorama de l’industrie des paiements » à partir du « World Payments Report 2011 », rapport annuel observant l’évolution du monde des paiements. Les grandes lignes :
- L’utilisation des espèces continue à progresser en Europe (y compris dans la zone Euro) plus rapide que le non-cash
- Les paiements non-cash progressent également (même en années de ralentissement économique) – La France second marché d’Europe – 3°% de la zone euro
- La carte a été le moteur de la croissance des dix dernières années et le chèque est en voie de remplacement. La France a une position établie dans la carte mais se distingue par le fort ancrage du chèque.
- Les paiements mobiles explosent – +40% des paiements sur mobile dans les pincipaux marchés (à comparer avec +10% pour les cartes). Les transactions mobiles pourraient dépasser le volume cartes d’ci 10 ans.
- Les initiatives des organes de régulation et instances professionnelles se multiplient et affectent tous les domaines de transformation – Près de 27 initiatives autour du NFC, cartes sans contact et SEPA.
- Les initiatives de nouveaux services (à base de nouvelles technologies) sont multiples mais aucune ne semble s’imposer
- Le besoin de standardisation et la concurrence vont pousser les acteurs à se spécialiser et à s’associer. Il est difficile pour une seule société d’être performant sur l’ensemble de la chaine.
La première table ronde a réuni Alexandre Hoffmann, Paypal, Claude Brun, EPC, Thibault Lanxade, Aqoba / Afepame et Rémi Steiner, Ministère de l’Economie, des Finances et de l’Industrie autour du sujet « Comment organiser le bouleversement des paiements et du terrain de jeu ? Faut il laisser les acteurs s’adapter seuls ? »
Claude Brun, EPC
Rémi Steiner a rappelé le rôle de la puissance publique et la modification du paysage du paiement en Europe. Organiser est perçu comme une entrave au développement du marché européen – SEPA. Banques sur la défensive, crise, concurrence, arbitrage, déclin du chèque. Ambivalence – modernité / traçabilité / anonymat.
Claude Brun, VP European Payment Council, a parcouru l’histoire des paiements entre -3000 avant JC en Mésopotamie jusqu’à 2018 et l’arrêt programmé du chèque en Grande Bretagne (mais bloqué par les associations caritatives) en passant par Nov. 2006 est le premier paiement sans contact en France. Claude Brun souhaite l’équité de la règle du jeu qui n’existe pas par rapport aux services de type Paypal. Il met en avant certains dangers de SEPA dont l’irrévocabilité des paiements.
Alexandre Hoffmann, Paypal France
Pour Alexandre Hoffmann, Paypal, c’est déjà 4 Mds $ de transactions sur mobile en 2011. Valeur ajoutée aux deux parties (commerçant et client), sécurité, ventes additionnelles, universalité tout en respectant le cadre réglementaire. Equation – mobile + réseaux sociaux + commerce physique. Repassez du Ecommerce au Commerce.
- Accélération de l’innovation -> 5 à 10 ans
- Ouvert dans l’approche de la technologie
- Ne pas tout faire tout seul / acquisition / coopération avec Home Depot et Ingénico pour des paiements physiques avec Paypal
- Ouverture de la plateforme x.com / x.commerce / APIs
- Retour aux fondamentaux
Thibault Lanxade, AQOBA
Pour Thibault Lanxade, Aqoba, il n’est pas simple de rentrer dans le monde des établissements bancaires, un monde en résistance permanente avec une capacité de manoeuvre faible. Exigences latentes coté consommateur et encore plus forte coté commerce. Le résultat de ces attentes crée de la valeur. 13 établissements de paiement en France autour de la transmission de fonds, de l’acquisition de transaction et de l’émission / moyens de paiement supplémentaires. Des questions de fond à résoudre qui « s’infusent lentement comme un sachet de thé vers dans un verre d’eau froide« .
La directive européenne sur la monétique (MO 2 ?) n’a pas été transférée en France. Difficile d’utiliser l’infrastructure bancaire. Pour Claude Brun, les banques ne sont pas opposées à ouvrir les infrastructures bancaires comme dans les modèles de l’énergie (ERDF) ou du ferroviaire (RFF) mais il n’y a pas de « free lunch ». Nécessité d’apporter des dépots pour couvrir son activité.
Sur le modèle économique, pour Paypal, c’est le marchand qui doit payer. Il n’y a plus de valeurs sur la transaction financière, il faut être ingénieux pour trouver de nouveaux modèles (Google)
Claude Brun, EPC, besoin de s’entendre tous les uns et les autres, les banques, l’Etat, l’Europe, les nouveaux entrants, les américains comme Paypal. Il ne faut pas opposer les banques et les nouveaux entrants.
Colloque "Moyens de Paiement"
Le keynote speaker suivant était Pierre Métivier, NET-7 Innovation, votre serviteur et vous pouvez retrouver cette intervention sur ce billet.
« Nouvelles technologies, nouveaux acteurs » était le sujet de deuxième table ronde de la matinée. « La réglementation fait bouger les lignes, mais ce sont la technologie et le marketing qui tirent l’innovation. a) de la carte à puce au mobile Internet: une tendance irrésistible à la dématérialisation. Mais jusqu’où ? b) du co-branding au Google wallet, en passant par Paypal : le paiement est-il soluble dans le shopping ? Le but du débat autour de ces deux questions est de faire apparaître les points forts et points faibles de l’industrie traditionnelle du paiement face à ces évolutions disruptives, et de mettre en évidence les zones de coopération possibles avec les acteurs du « nouveau monde » ainsi que les terrains probables de compétition. »
avec Didier Durand, Orange, Nicolas Benady, Limonetik, Jacques Behr, Ingenico, Charlotte Desbons, Visa Europe, Bastien Latge, Inside Secure, et Bernard Roy, La Banque Postale.
Colloque "Moyens de Paiement"
Pour Jacques Behr, Ingenico, avoir 30 années d’existence sur ce marché n’est pas synonyme de ringardise mais bien au contraire un gage de confiance pour le marché en terme d’innovation. Et la confiance est un facteur critique de l’environnement des paiements. Quand aux nombreuses initiatives nouvelles, leur succès dépend de facteurs comme l’universalité, la sécurité et l’ensemble de la valeur ajoutée qu’ils peuvent apporter. Ingenico s’associe à de nombreuses de ces innovations partout dans le monde (comme avec Paypal ou Google) mais pense que seul très peu d’entre elles atteindront le volume critique. A court terme la convergence multicanaux des systèmes d’acceptation physique, mobile et internet est un enjeu de taille .
Pour Nicolas Benady, Limonetik permet à des sites d’accepter les cartes de paiement sans installation, acceptation chez les commerçants. Les sociétés qui démarrent peuvent utiliser les infrastructures existantes.
Nouveaux systèmes de paiement moins chers – logiciel et cloud. La vraie barrière à l’entrée est l’acceptation par les consommateurs ET les commerçants.
Bastien Latge, Inside secure. Le déploiement des nouveaux services passera par le volume. Exemple de la Télécarte qui avait bénéficié d’un déploiement massif par FT. Les cartes des paiement et de transport sans contact peuvent jouer ce rôle. Inside se propose de booster l’écosystème sans contact avec une solution NFC intégrée dans la carte SIM, rendant ainsi compatible de nombreux mobiles existants.
Colloque "Moyens de Paiement"
Didier Durand, Orange, est revenu sur les expériences sans contact comme Nice où le taux d’adoption et recommandation des utilisateurs de services sans contact est de 90% à 95%. Dématérialisation du paiement de proiximité. Notion de terminal de paiement de proximité dans les magasins. Pour l’achat en ligne, Buyster, Kwixo, Paypal, De multiples solutions de paiement suivant le type d’achat.
Bernanrd Roy, La banque Postale, la plus jeune des grandes banques, multi-canal. Attention à ne pas exclure avec les nouvelles technologies. Enjeux de coût et donc être prudent pour adopter une nouvelle technologie. Vu du consommateur, le paiement n’est pas un service en soi, on ne doit pas le payer
Charlotte Desbons, Visa Europe. Proposer des solutions de paiement grand public, simple, accepter partout dans le monde en respectant la réglementation. Face à tous ces changements, le coeur de métier de Visa ne change pas. Explosion des technologies – fin 2012 – 50 mio de carte Visa sans contact, 20% des transactions dans le ecommerce, explosion du nombre des acteurs, la chaine de valeur de fragmente, explosion du volume des données, Visa – une 1 transaction sur 5 en France, 12 mds de transactions par jour dans le monde ! La sécurisation est plus importante sur une puce dans un mobile connecté que dans une carte plastique.
A quand le moment du paiement sur mobile ? Bientôt pour Charlotte Desbons, les banques investissent dans les DaB avec et sans contact pour un déploiement de proximité + échange en peer to peer + transformation du parcours client avec l’arrivée du portefeuille numérique.
Question à ses enfants d’un des intervenants à la table ronde – « Tu veux un compte bancaire ? » « Oui papa, mais Paypal ou iTunes. »
L’arrivée des opérateurs telecom influence le business model. La gestion de la carte SIM a un coût.
Si c’est simplement pour remplacer la carte bancaire, les technologies sans contact ne servent pas à grand chose.
La confiance perçue est importante. Vidéo présentant Google Wallet de 1:30 / 45 s sur la sécurité.
François Lecomte, Forum SMSC
Cette matinée dédiée aux bouleversements et aux technologies a été clôturée par François Lecomte du Forum des Services Mobiles Sans Contact.
Rupture inéluctable, développement de services de proximité, besoin de générer de la confiance Le rôle du Forum est d’aider au développement des services mobiles sans contact en réunissant tous les acteurs –
industriels, startup et PME, territoires, associations, fournisseurs de services.
Retour du NFC symposium en Suède, frilosité du marché, les banques nordiques sont réservées, les opérateurs mobiles peu pro-actifs. Développement en cours DNB / Telenor DNB / telenor
Un vrai enjeu d’évangélisation dans le reste du monde autour du NFC
- Norvège – développement DNB / Telenor
- Le Japon devient SIM based et interopérable
- Les acteurs coréens ont créé une alliance NFC.
- Google y croit, l’a annoncé très clairement et les opérateurs télécom ont suivi avec ISIS
Standardisation des paiements sans contact – AEPM
Le client est roi, le client est acteur, avec son mobile il a du choix, il recherche des bons plans.
Offre cross-channel : l’offre commence à domicile, ubiquité du nouveaumonde du shopping
La recette magique sous l’acronyme ICES – Identifier le besoin client, Coordonner l’offre, Evangéliser, Subventionner
En France, nous sommes prêts à déployer un écosystème complet autour des services mobiles sans contact aux services des citoyens.
A suivre … avec la deuxième partie de ce colloque.
PS. les photos du colloque